Inventez le travail que vos salariés vont aimer

Vous êtes disposés à réinterroger vos pratiques managériales pour répondre aux nouvelles aspirations de vos collaborateurs ?
​Dans un article reprenant l’essentiel de son livre « Love + work », Marcus Buckingham nous livre quelques pistes de solutions pour fidéliser les collaborateurs.

​Le britannique Marcus Buckingham a été longtemps chercheur dans le domaine des ressources humaines et du management avant de créer son propre cabinet de conseil. Auteur de plusieurs livres, il en a publié un récemment au titre accrocheur « Love + work », dont il a résumé le contenu dans un article paru dans la Harvard Business Review France (HBR) en octobre-novembre 2022.

Déroutant par certains aspects, l’article apporte un éclairage oblique sur le sujet du moment : comment fidéliser ses collaborateurs.

A travers cet article, je vais vous restituer de façon très synthétique les constats qu’il fait en matière de désengagement des collaborateurs ainsi que les pistes de solutions qu’il esquisse pour fidéliser les collaborateurs. Je viendrai compléter avec quelques recommandations pour les managers.​

​Quelques constats sur ce qui cloche dans l’engagement des collaborateurs

​Marcus Buckingham commence par souligner que le phénomène de désengagement et de souffrance au travail préexistait mais qu’il a été renforcé par la pandémie.
 
Il remarque que les leviers classiques d’engagement tels que le fait de disposer d’un bon salaire, d’un lieu de travail adapté, de bien s’entendre avec ses collègues et de croire dans les missions de son organisation ne suffisent plus à générer rétention des talents, engagement, performance et résilience au travail. D’une certaine façon ce sont des conditions nécessaires mais insuffisantes.
                       
L’amour pour le contenu du travail lui-même devient un élément déterminant, avec des questionnements plus ou moins explicites de la part des collaborateurs de type : suis-je enthousiaste à l’idée de travailler chaque jour ? ai-je l’occasion de mettre à profit mes forces et ma créativité ? ai-je l’occasion de faire au travail ce en quoi j’excelle et quelque chose que j’aime ?
Il dresse ensuite un parallèle surprenant, pour qui n’est pas familier de la recherche en neuro-biologie, entre l’état amoureux et le fait d’aimer son travail. Aimer son travail permettrait d’après ses recherches de s’ouvrir à de nouvelles pensées et émotions, de faciliter l’ancrage mémoriel, de gagner en rapidité et efficacité et de mobiliser au maximum son énergie.
 
Or la plupart des organisations ont été construites sans tenir compte des passions ou aversions des salariés et ont développé, au nom de la performance et d’une appréciation objective, des processus avec des étapes standardisées, des référentiels de compétences et des mesures de succès basées sur le degré de conformité des salariés à ces référentiels. Pour l’auteur ce sont ces cadres ou conditions de travail qui expliquent pour beaucoup aujourd’hui un désengagement des collaborateurs.
 
Alors faut-il répondre à cette nouvelle injonction « d’aimer son travail », particulièrement prégnante dans les jeunes générations ?
Oui, sans aucun doute répond Marcus Buckingham, tout en apportant un bémol à ce qui pourrait apparaître comme une demande de travail « 100 % fun ». Ainsi, les recherches démontreraient que les individus peuvent se contenter de n’aimer qu’une partie de leur travail pour déclencher les dynamiques positives citées plus haut.
 
Pour répondre à cette demande, il nous apporte quelques pistes de solutions sur le sujet.

​Alors quelles solutions pour fidéliser les collaborateurs ?

En premier lieu, l’auteur invite à mettre réellement les individus au centre de l’organisation, comme point d’intégration et de réalisation des besoins manifestés par les parties prenantes (actionnaires, clients …).
Concrètement, il suggère pour cela que les nouveaux collaborateurs soient incités à se fixer leurs propres objectifs professionnels, mais aussi personnels, dès la phase d’intégration : manière de s’engager en mobilisant ses points forts et de les valoriser au sein de l’équipe.
Il encourage aussi à investir dans la formation continue de chaque salarié, sans objectif de retour immédiat pour l’entreprise, par la prise en charge de formations, le remboursement de prêt étudiant, voir l’allocation de temps pour des projets propres : j’ai à ce sujet un exemple récent d’une entreprise qui a réussi à fidéliser un collaborateur clé qui voulait démissionner pour se lancer dans la réparation de vélos et qui a été très heureux de se voir proposer de travailler à 80% pour dégager une journée pour exercer sa passion.
Il souligne aussi l’importance de soutenir et valoriser les anciens salariés : affichage de leur photo dans l’entreprise, accompagnement et animation d’un réseau d’anciens pour favoriser une culture commune et des liens interpersonnels. Vous n’êtes en outre pas à l’abri d’une bonne surprise : telles ces entreprises où d’anciens collaborateurs demandent à revenir, après avoir constaté que l’herbe y était tout bien pesé plus verte que là où ils sont partis.
 
Dans un autre registre, Marcus Buckingham invite à s’intéresser prioritairement aux individus dans l’organisation ou dans l’équipe.
Cela passe selon lui par le fait d’éviter ou limiter les outils qui standardisent les compétences à maîtriser, les outils de feedback qui évaluent les personnes par rapport à ces mêmes modèles, les parcours professionnels rigides avec des trajectoires professionnelles établies sur ces bases, toutes solutions bien établies en particulier dans les grands groupes et qui peuvent vite devenir excessivement normatives.
Mobiliser les personnes passe aussi par le fait de savoir limiter la prolifération d’indicateurs de tous types en restant sur des objectifs de résultats simples et sur lesquels les personnes ont la main (exemple: taux de disponibilité d’une machine, CA, score de satisfaction, …)
Le collaborateur sera d’autant plus impliqué qu’il pourra aussi exprimer sa singularité dans son travail en choisissant ses activités et la manière de les réaliser et en faisant preuve de créativité.
Enfin attacher une attention toute particulière à l’intégration des individus dans les équipes. On sait en effet qu’un fort sentiment d’appartenance à l’équipe génère implication au travail et par ricochet sentiment d’appartenance à l’organisation et que l’équipe est le lieu idéal où peuvent être prises en compte et se combiner les singularités de chacun. L’intégration dans l’équipe peut être favorisée en en faisant un critère de recrutement et en l’expliquant au nouveau collaborateur lors de son arrivée; en explicitant les complémentarités de compétences ; et en créant des temps de convivialité.
           
Enfin, l’auteur insiste sur la nécessité de revisiter l’ensemble des pratiques managériales de façon à les fonder sur la confiance, car c’est la confiance perçue qui permet aux salariés d’oser explorer de nouvelles méthodes, prendre en charge des activités de la façon qui leur convient le mieux.
Invitation donnée donc à abandonner les rituels qui érodent la confiance (bien que généralement perçus comme renforçant l’alignement et la performance) tels que des objectifs venant d’en haut, les évaluations de rendement ou les évaluations à 360°. Pourquoi, selon l’auteur, ne pas laisser les salariés définir leurs propres objectifs, pour mieux les discuter et les ajuster en cours d’année ?
Autre suggestion, ritualiser des temps de discussion au sein des collectifs de travail (collaborateurs et manager) avec des conséquences organisationnelles à la clé : réduire les attributions des managers et limiter la taille des équipes à encadrer pour dégager du temps pour les managers. Il insiste sur la mise en place d’entretiens individuels hebdomadaires consacrés à l’écoute et au soutien du salarié, structurés autour de questions sur le passé récent et le futur proche (il ne s’agit pas de faire de point d’avancement, ni de donner du feedback) : une occasion unique de détecter les irritants et de se prémunir contre une démission.

​Quelques pistes de réflexions personnelles

La réflexion de Marcus Buckingham ne vient pas clôturer définitivement ce sujet éminemment mouvant qu’est celui de la nouvelle relation au travail et des leviers de motivation permettant de fidéliser les collaborateurs.

Elle rejoint néanmoins quelques convictions personnelles que j’aime à faire partager aux managers lors de mes interventions. Je mettrai en exergue quelques solutions clés que j’évoque pour fidéliser les collaborateurs :

  • Permettre à chacun d’apprendre au sein de l’équipe, en explorant et utilisant les compétences « cachées » des collaborateurs, en associant les compétences dans des groupes de travail ponctuels, en créant des temps dédiés aux partages de méthodologies et retours d’expérience pour enclencher des boucles d’amélioration continue.
  • Permettre à chacun de construire de façon collaborative ses priorités stratégiques et les objectifs qui en découlent : il s’agit alors de construire un projet d’équipe ou de service qui décline les priorités stratégiques de son organisation et qui les croise avec les besoins des clients, les évolutions métiers ainsi que les aspirations de ses membres.
  • Laisser de la place à la créativité de chacun en bannissant les objectifs de moyens ou d’activités, tout en partageant les meilleures pratiques à travers les rituels cités plus hauts.
  • Offrir des espaces d’expression à chacun en ritualisant les points bilatéraux en complément des réunions collectives : il est toujours plus facile pour un collaborateur de s’exprimer quand ce pli est pris, plutôt qu’en demandant à son manager de faire un « point de situation ».

Conclusion

Incontestablement, un article comme celui-ci devrait soulever interrogations, voire contestations, tant il prend à rebrousse-poil des pratiques bien établies dans le management des organisations.

Si l’on évalue correctement l’ampleur des remises en cause qui affectent le monde du travail, alors il est aussi une invitation rafraîchissante à « sortir du cadre » pour explorer des solutions non conventionnelles.

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Consultant-formateur, intervenant spécialisé sur les nouveaux modes de travail et le développement des territoires.

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